Dans un de ses articles, le blogueur Mony Chhim donne ce qu’il considère comme les 10 facteurs clés du développement de Singapour. Nous reprenons ici ces facteurs et nous vous questionnons sur leur pertinence pour la RDC, toute proportion gardée.
Singapour : de beaux résultats
Vous pouvez lire l’article de Mony Chhim (MC) dans son blog, en cliquant sur le lien ci-après : les 10 facteurs clés de succès de Singapour.
En 50 ans, soit de 1965 à 2015, Singapour a augmenté son PIB par habitant, en Parité Pouvoir d’Achat (PPA), en passant d’environ 4.000 USD à 50.000 USD. Ce succès insolent peut être résumé par ses 3 classements mondiaux suivants, pour l’année 2015 :
- PIB par habitant : 7ème rang mondial. Source : The CIA World Factbook
- Compétitivité globale : Index 2 (Les meilleurs : 1-7). Source : World Economic Forum
- Facilité de faire du business : 2ème rang mondial. Source : Banque Mondiale – Doing Business
Ces 10 facteurs de développement et nos commentaires pour la RDC
Facteur 1 : L’Amplification des Atouts Stratégiques
MC constate que, pour son développement rapide, Singapour a exploité au maximum ses atouts stratégiques.
RDC – Atouts stratégiques
Nous pouvons considérer comme atouts stratégiques nos 80 millions d’hectares de terre arable ; nos ressources minières non exploitées évaluées à plus de 24.000 Milliards de USD ; nos réserves en minerais stratégiques pour les industries mondiales à forte croissance de demain (le Cobalt et le Coltan) ; notre potentiel hydroélectrique en énergie propre, dont le grand Inga ; l’énorme stock carbone du bassin du fleuve Congo et les flux financiers potentiels de l’économie climatique internationale ; notre superficie nationale continentale ; etc.
D’après vous, quel sera le niveau de richesse de la RDC, si nous exploitons ces atouts de façon optimale ? Comment nous organiser pour faire ce saut qualitatif ?
Comme un premier pas, nous suggérons la publication par le gouvernement de l’évaluation chiffrée des revenus potentiels enfermés/ endormis dans nos ressources majeures. Ainsi, en comparaison avec le niveau des revenus actuels par secteur, tout congolais prendra conscience du fossé qui existe, entre ce que nous sommes et ce que nous devrions être ! Et quelles devraient donc être les priorités économiques de tout gouvernement congolais.
Rien qu’avec notre potentiel agricole, le Congo peut rapidement devenir une puissance agricole mondiale !
Facteur 2 : L’Hyper-Pragmatisme, l’Ouverture d’Esprit et l’Humilité gouvernementale
Singapour a fusionné les meilleurs aspects du capitalisme et du communisme, et a ainsi créé un système unique, une économie de marché guidée.
Du capitalisme, les dirigeants de Singapour ont retenu une économie libre, transparente, ouverte et pro-business ; des taxes et impôts très faibles, du fait d’un gouvernement économe, dont les dépenses de fonctionnement sont minimisées ; et une culture de méritocratie où n’accèdent aux responsabilités que les meilleurs.
Comme socialistes, ils se sont comportés en un Etat pro petit-peuple, qui fournit des logements bon marché à 80 % de la population ; qui subventionne fortement les soins médicaux, l’éducation et les transports publics, avec l’ambition de donner à tout singapourien un niveau de vie correct.
RDC – Pragmatisme et Humilité gouvernementale
En RDC, quelle est l’idéologie économique de chacun de nos 400 partis politiques ? Lesquels sont de la droite libérale ? Ou de la gauche sociale ? Ou encore du centre modéré ? Lesquels sont de l’extrême gauche, anti capitaliste et contre le néolibéralisme ? Lesquels sont de l’extrême droite, nationaliste, régionaliste, suprématiste tribal, voire même sécessionniste ? A moins que tous n’aient qu’une idéologie opportuniste, sous des labels sans sous bassement de… regroupement politique ! Ce que d’aucuns qualifient d’idéologie d’affairisme politique, dont la seule finalité est le partage intéressé des postes ministériels ?
Difficile dans ces conditions d’avoir un gouvernement « humble », qui réserverait une bonne portion du budget national au développement du pays, et non pas aux payements des émoluments des dirigeants et au financement d’autres avantages divers qu’ils se donnent.
Nous proposons un retour aux bonnes pratiques de management, par le re-profilage du gouvernement, pour lui donner une forme plus solide et stable. Que le nombre de ministères soit prédéfini une fois pour toutes, ainsi que le nombre des membres des cabinets ministériels. Plus encore, qu’il soit déterminé à l’avance le profil des titulaires pour chaque fonction, tant sur le plan de compétences que de la moralité.
Il nous parait important d’arrêter avec le manque de considération actuelle de la fonction de ministre, qui semble être devenue juste un paramètre d’ajustement politique, entre les membres des coalitions de gouvernement pour la circonstance, au mépris de la responsabilité d’un ministre sur le travail de fond qui doit être fait, pour le développement du pays. Comme s’il n’y avait aucune exigence de compétences et de probité, pour ces fonctions si importantes pour l’avenir de notre peuple ! Tous les 400 chefs de partis ne sont pas faits pour devenir Ministre, avec un grand M, sauf si nous voulons continuer avec les résultats que nous connaissons !
En faisant une telle transformation structurante, la RDC pourrait devenir une grande puissance politique en Afrique, par la qualité de son organisation gouvernementale.
Et vous, quelle proposition faites-vous, pour qu’on ait toujours un gouvernement qui travaille réellement pour le bien du pays et de ses laissés-pour-compte ?
Facteur 3. La Planification Stratégique et l’Excellence d’Exécution
En 1965, Singapour avait de graves problèmes de chômage, de main d’œuvre mal éduquée et d’habitations de mauvaise qualité. Dans son plan stratégique, exécuté avec brio, ce pays a lancé une politique industrielle très vigoureuse pour attirer les investissements directs depuis l’étranger, pour créer des emplois et pour former des travailleurs qualifiés. Il a aussi initié la construction des logements de qualité, à des prix modérés. Grâce à cette initiative, 90% des singapouriens sont propriétaires de leur domicile.
RDC – Planification stratégique et exécution des plans
En RDC, qui se souvient des stratégies d’industrialisation de nos villes et villages depuis l’indépendance ? Et durant les 10 dernières années ? Ou encore qui connaît nos plans stratégiques pour les 10 années à venir ? Avons-nous seulement une stratégie nationale quelconque, ou bien nous attendons plutôt des programmes initiés par des institutions internationales ?
Nous proposons que la stratégie nationale de développement soit connue de tous, et le suivi de son exécution fait par tous, via des publications trimestrielles par le gouvernement des progrès réalisés ! La stratégie est une affaire de tous, pas un document pour un petit groupe de technocrates. De telles stratégies secrètes pourrissent toujours dans des tiroirs, faute nos petites mains expertes pour les traduire en réalité !
Et d’après vous, que devrait faire la RDC, pour que chaque congolais ait une plus grande lisibilité du Congo socio-économique de demain, que les dirigeants essayent de bâtir ?
Avec une planification pragmatique, et son exécution professionnelle, la RDC peut rapidement devenir une grande puissance économique de l’Afrique Subsaharienne.
Facteur 4 : La Rationalité Économique
A Singapour, le niveau de taxation global est extrêmement faible : 15,4 % du PIB (son classement mondial en termes de taxes « élevées » : 190). Les charges fiscales sont minimales, aussi bien pour les particuliers que pour les entreprises, ce qui attire de nombreux particuliers fortunés et y favorise la domiciliation fiscale des entreprises internationales. Le gouvernement peut se permettre cette politique car ses dépenses de fonctionnement sont extrêmement basses.
RDC – La rationalité économique
En RDC au contraire, le train de vie de l’Etat est extrêmement dispendieux. Un gaspillage inutile de peu de ressources disponibles. D’où, le terrorisme fiscal souvent constaté, afin de soutenir les fastes de la vie ministérielle. On doit cesser de vivre au-dessus de nos moyens.
Nous proposons de réduire sensiblement ces frais de fonctionnement de l’administration publique, de faire une formalisation des petites activités informelles et de fixer les taxes le plus bas possible, en adéquation avec le niveau de vie et de la capacité financière de la population ?
Que pensez-vous que l’Etat congolais devrait faire, pour que l’on ne vive pas au-dessus de nos moyens réels et que le peu de ressources disponibles soit affecté en priorité aux secteurs de plus grande production de la richesse nationale ?
Facteur 5 : L’Efficacité Opérationnelle
La modernité et la qualité des infrastructures est un des facteurs-clé qui explique directement l’efficacité économique de Singapour.
RDC – L’inefficacité économique
En RDC, la qualité des infrastructures dénote au contraire une inefficacité opérationnelle sans nom. L’état des routes intérieures, des voies ferrées, des voies navigables, de fourniture d’énergie électrique et de distribution de l’eau en sont des démonstrations patentes.
Nous proposons l’établissement d’un plan sectoriel de maintien des infrastructures, avec des objectifs clairement définis pour chaque domaine et pour toutes les provinces, objectifs étalés dans l’espace et dans le temps, en concordance avec un plan de développement intégré de l’arrière-pays. Le développement réel du Congo viendra de la construction de notre économie rurale, via la production de nos fermes agricoles et de nos industries rurales !
Comment pensez-vous que la RDC peut entretenir ses infrastructures, surtout dans l’arrière-pays, pour que l’on soit capable de faire comme en 1959, d’aller de Léopoldville (Kinshasa) à Elisabethville (Lubumbashi) en 2Cheveaux ?
La RDC peut devenir une plateforme régionale de transport routier et ferroviaire pour relier les pays africains, de l’Est à l’Ouest et du Sud au Nord.
Facteur 6 : La Recherche & le Développement et l’Éducation
L’économie mondiale devient de plus en plus une économie de l’intelligence. Depuis 1991, Singapour a lancé des plans stratégiques pour renforcer les capacités technologiques du pays.
Le système éducatif y est méritocratique ; certains le disent élitiste. Il donne les mêmes chances à tous et récompense les meilleurs, indépendamment de leur origine sociale.
Aujourd’hui les écoliers singapouriens de 9-10 ans sont extrêmement performants en Maths (classement mondial : 1) et en sciences (classement mondial : 2).
RDC – R&D et Formation scolaire
En RDC, pour l’amélioration de la Recherche & du Développement ainsi que pour la formation scolaire, on a commencé avec la gratuite de l’école publique. Une très bonne chose, un bon début. Il faut maintenant boucler la boucle.
Pour cela, nous suggérons la prise d’une initiative pour assurer une bonne qualité à cette école gratuite. Quand toutes nos écoles primaires, même celles de nos villages, auront eu le niveau de l’école primaire belge, alors on pourra dire que l’on forme sérieusement les travailleurs d’un puissant RDC de demain. Travailler avec les réseaux des écoles catholiques et protestantes pour densifier l’école primaire de qualité jusqu’aux villages les plus reculés représente une perspective intéressante à explorer.
Nous proposons ensuite de rendre dans les faits l’école primaire obligatoire. Mieux encore. Les programmes de l’enseignement sont à restructurer. Tout finaliste de l’école secondaire doit avoir une qualification professionnelle et être capable de valablement travailler. Aujourd’hui, la RDC a besoin des écoles des métiers, des technologies et d’entreprenariat, plus que de celles pour apprendre l’histoire de la Grèce antique, même si celles-ci restent aussi nécessaires …
La RDC peut devenir une grande puissance technologique en Afrique, très facilement !
Et vous, quelles sont vos idées pour que chacun de 80 millions de congolais ait une compétence professionnelle valable, afin de devenir un contributeur effectif de la croissance de notre PIB ?
Facteur 7 : La Stabilité Politique
Pour éviter les problèmes d’instabilité politique et son impact sur le développement du pays, le gouvernement de Singapour a mis en place une politique autoritaire qui a restreint les libertés individuelles.
RDC – La Stabilité Politique
En RDC, il y a souvent eu ces restrictions des libertés, mais pour des visées plutôt politiques, et non pas économiques. Nous croyons que l’exemple d’une discipline de vie et de correction dans les activités économiques doit venir des dirigeants.
Nous proposons l’élimination d’une des causes majeures de l’instabilité politique dans plusieurs pays, à savoir, l’accrochage des dirigeants au pouvoir. La solution est d’appliquer, en RDC, une limitation stricte de nombre des mandats électifs, sans possibilité de remise à zéro du compteur, sans possibilité de rappel d’un dirigeant fin terme par le peuple, sans la possibilité d’assurer la continuité du service de l’Etat par manque d’élections. Dans ce dernier cas, les dispositions de vacance du pouvoir doivent devenir d’application, pour sanctionner tout dirigeant incapable, qui n’a pas pu organiser des élections. On ne devrait plus se prévaloir de ses propres turpitudes.
Mieux organisée, la RDC peut devenir un pôle de stabilité politique en Afrique Centrale.
Que pensez-vous que la RDC peut faire, pour réduire l’impact de l’instabilité politique, sur le développement économique et social du pays ? Que faire ? Que ne point faire ?
Facteur 8 : La Prudence et la Prévoyance
Les Singapouriens salariés sont soumis à un régime d’épargne obligatoire individualisé nommé le CPF, le « Central Providing Fund ». Ce fond permet ainsi de financer une retraite correcte des pensionnés, les frais de santé de citoyens et l’achat de leur maison.
RDC – La Prévoyance Sociale
En RDC, les retraités sont laissés à leur propre sort. Leur pension de retraite n’est aucunement liée au coût de la vie. Plus ils vieillissent, plus leur pouvoir d’achat diminue. Et cela n’émeut personne !
Nous avons besoin des vrais partis politiques de gauche, pour s’occuper des laissés-pour compte de notre société, surtout de ceux qui ont contribué toute leur vie à la Caisse Nationale de la Sécurité Sociale.
Nous proposons qu’au calcul de la retraite, le montant obtenu soit indexé au coût de la vie, si cela n’est pas fait. De façon qu’annuellement, une révision de la pension de retraite soit faite. Pour plus de justice et par humanité, si ce dernier mot a encore un sens en RDC.
La Caisse Nationale de Sécurité Sociale peut devenir un grand investisseur institutionnel comme partout dans le monde, pour mieux fructifier les cotisations à la sécurité sociale des travailleurs, et ainsi se donner les moyens de payer correctement leurs pensions de retraite, et même d’être munificente, pourquoi pas ?
Et pour vous, comment rendre notre système de prévoyance sociale plus juste, plus éthique et plus efficace ?
Facteur 9 : L’Agilité, la Réactivité et l’Agressivité d’Exécution
A Singapour, si le gouvernement perçoit une opportunité économique à saisir ou veut tester une nouvelle politique, il agit immédiatement, sans perte de temps en atermoiements stériles.
RDC – Vitesse et Pertinence de réaction
Un point sans commentaire ! En RDC, on fait des discours, on passe aux chaînes télévisées, on place des calicots sur les routes ou on organise des marches. Après, plus rien ! Une opportunité économique mondiale à saisir est, par exemple, la montée en puissance de l’industrie de véhicules électriques. Leurs batteries seront faites à l’aide du cobalt, dont nous possédons la plus grande réserve mondiale. Quel est le plan RDC pour engranger la richesse qui sera ainsi générée par l’explosion future de la vente de ces véhicules électriques ? A notre connaissance, rien et nous souhaitons nous tromper !
Le gouvernement a-t-il pris contact avec la firme américaine Tesla, le numéro 1 mondial du véhicule électrique, pour examiner comment cette dernière peut travailler avec la RDC, le producteur mondial numéro 1 du cobalt, pour envisager de construire une usine de fabrications des batteries en RDC ? Nous n’en savons rien !
Et pour vous, y a-t-il quelque chose qui peut rendre la RDC plus réactive et rapide dans ses actions ? Pour saisir toutes les opportunités économiques de l’heure ?
Facteur 10 : Les Valeurs Fondamentales de self-Discipline et d’intégrité
Self-discipline : globalement, les Singapouriens sont sérieux et appliqués, ils ont tendance à respecter les règles et travaillent beaucoup.
Intégrité : le gouvernement est honnête, la corruption et la criminalité sont extrêmement faibles. C’est un pays où règne le droit et la sécurité, qui encourage les entrepreneurs à se lancer et les étrangers à venir s’installer.
RDC – Valeurs cardinales du gouvernement
Dans les discours, nous avons beaucoup de qualités en RDC, ou des très bonnes intentions. Mais, notre pratique quotidienne affiche tout le contraire.
A l’intégrité, telle que définie pour Singapour, nous proposons l’ajout pour la RDC de la criminalisation des commissions, des passe-droits ou des coops (coopérations – commission pour un apporteur d’affaires). Pire. La pratique de demande d’obtention des parts gratuites dans l’actionnariat des investisseurs par certains décideurs politiques, contre leur signature pour l’approbation des offres d’investissement, doit être extrêmement combattue. Comme aucune entreprise sérieuse n’accepte ce genre de deal, il ne nous revient souvent que des investisseurs crapuleux et spéculateurs ou des fonds vautours. On chasse ainsi nous-mêmes des grands investisseurs qui ont la capacité de faire la différence pour notre pays.
Conclusion : La RDC vs les 10 facteurs clés de Singapour ?
La RDC a vocation d’être une grande puissance en Afrique. Comme pour Singapour, il nous faut juste un dirigeant visionnaire, juste, rigoureux et surtout très ambitieux pour le Congo, pour impulser la dynamique de la construction au quotidien de ce géant africain, par le travail méthodique de tous les 80 millions des congolais, et ce sur toute l’étendue de nos 2.345.000 km2, afin de rattraper notre énorme retard de développement.
De plus, une reforme structurante du gouvernement est requise, pour le rendre plus professionnel et plus performant, face aux enjeux du moment et aux défis du 21e siècle !
Une RDC puissante est possible !
Pour l’éducation, je pense que chaque province doit à terme assurer une formation de niveau secondaire et supérieure de qualité, pour tous les domaines importants de la province : l’agriculture, les mines pour tous les minerais disponibles dans la province, l’entreprenariat, l’informatique,… Pour qu’on couvre les besoins en qualification des ressources humaines de la province
Absolument. Une formation bien organisée doit être faite, en réponse aux besoins spécifiques en qualification professionnelle, que nécessite le développement de la province. Beaucoup d’ingénieurs en métallurgie qui avaient si bien fait tourner la Gécamines venaient de l’université de Lubumbashi ! Cela devrait être de même pour le Coltan du Kivu !